Entreprise individuelle à l’IS : avantages et inconvénients de l’option fiscale

Auteur
Camélia BENABDELLAZIZ
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L’entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022 a consacré le statut d’entrepreneur individuel (EI) et en a précisé les modalités. Ce statut permet désormais d’opter pour l’impôt sur les sociétés (IS), ce qui représente une évolution significative. Si aucune société n’est créée sur le plan juridique, cette option emporte la naissance d’une entité fiscale distincte de l’entreprise antérieurement imposée à l’impôt sur le revenu. Ce changement de régime implique des conséquences juridiques, fiscales et comptables, qu’il convient d’appréhender avec précision.

Le cadre juridique et fiscale de l'entreprise individuelle à l'IS

La réforme de 2022 a redéfini les contours du statut de l’entrepreneur individuel, en consacrant la séparation automatique du patrimoine professionnel et personnel. Elle a surtout ouvert la voie à une option majeure : l’assujettissement de l’EI à l’impôt sur les sociétés.

Sur le plan juridique, l’entreprise reste confondue avec la personne de l’entrepreneur. En revanche, fiscalement, l’option permet à l’EI d’être assimilée à une EURL soumise à l’IS. L’entrepreneur individuel devient ainsi redevable de l’impôt sur les sociétés sur les bénéfices réalisés par l’activité, au lieu d’être imposé à l’impôt sur le revenu.

L’option doit être exercée avant la fin du troisième mois de l’exercice en cours, et est en principe irrévocable. Toutefois, un droit à renonciation dans un délai de cinq ans est prévu, sous conditions.

Conséquences fiscales, sociales et comptables de l’option

Régime fiscal applicable à l’EI à l’IS

Le principal intérêt réside dans la dissociation entre l’imposition des bénéfices de l’entreprise (soumis à l’IS) et celle des revenus perçus par l’entrepreneur (soumis à l’IR). Les taux d’imposition applicables à l’IS sont de 15 % jusqu’à 42 500 € de bénéfices, puis de 25 % au-delà. La rémunération versée devient une charge déductible, ce qui diminue le bénéfice imposable.

Cependant, les dividendes distribués sont partiellement assujettis aux cotisations sociales lorsqu’ils excèdent 10 % du bénéfice net fiscal ou du patrimoine professionnel affecté.

Régime social de l’entrepreneur individuel à l’IS

L’entrepreneur reste affilié à la Sécurité sociale des indépendants (SSI). Les cotisations sociales sont calculées sur la rémunération réelle, et non plus sur le bénéfice global, ce qui permet une certaine latitude dans la gestion des charges sociales. Toutefois, un arbitrage stratégique entre rémunération et dividendes s’impose pour éviter les effets de seuil.

Régime comptable renforcé

L’option pour l’IS impose à l’entrepreneur individuel de se conformer aux obligations comptables des sociétés : comptabilité d’engagement, bilan, compte de résultat, annexes. Une rigueur accrue est donc nécessaire, et l’accompagnement d’un professionnel du chiffre ou du droit devient incontournable.

Avantages de l’option pour l’impôt sur les sociétés

Une fiscalité maîtrisée et optimisable

Opter pour l’IS permet de ne soumettre à l’impôt sur le revenu que les sommes effectivement perçues (rémunération et dividendes), tout en conservant une imposition à taux réduit sur les bénéfices non distribués. Ce mécanisme peut générer une économie d’impôt importante, notamment lorsque l’activité dégage une rentabilité excédentaire.

Constitution de trésorerie et stratégie de croissance

Le maintien des bénéfices dans l’entreprise, du fait d’une fiscalité modérée, permet de constituer une trésorerie solide, de financer des investissements ou d’anticiper une structuration future en société de capitaux. Ce modèle convient particulièrement aux entrepreneurs en phase de croissance.

Meilleure distinction patrimoine privé / professionnel

L’assimilation à une société à l’IS favorise une séparation plus nette entre les sphères personnelle et professionnelle, facilitant la gestion patrimoniale de l’entrepreneur. L’EI à l’IS devient ainsi un outil d’organisation efficace, tant sur le plan fiscal que successoral.

Inconvénients et limites de l’entreprise individuelle à l’IS

Une complexité administrative et comptable accrue

Le passage à l’IS entraîne des obligations supplémentaires : comptabilité commerciale complète, déclarations fiscales spécifiques, formalisme de gestion plus strict. Cette charge de gestion peut être contraignante, surtout pour les petites structures.

Une protection sociale à surveiller

L’optimisation fiscale par une faible rémunération peut impacter négativement les droits sociaux : retraite, indemnités journalières, protection en cas de maladie. Par ailleurs, les dividendes peuvent être assujettis aux cotisations sociales si leur montant excède certains seuils.

Un choix engageant sur plusieurs années

L’option pour l’IS ne peut être révoquée que dans un délai de cinq ans. Cette durée peut être longue si la situation financière ou patrimoniale de l’entrepreneur évolue, notamment en cas de baisse d’activité ou de changement de stratégie.

À qui s’adresse l’EI à l’IS ?

L’option pour l’IS est particulièrement adaptée aux entrepreneurs individuels réalisant un bénéfice conséquent, n’ayant pas besoin de consommer l’intégralité de leur résultat pour vivre. Elle permet de structurer l’activité en vue d’une transformation ultérieure en société (SASU ou SARL, par exemple).

En revanche, elle est rarement adaptée aux entrepreneurs en phase de démarrage à faibles revenus récurrents. Dans ce cas, le régime de l’impôt sur le revenu reste plus flexible et moins coûteux à court terme.

Recommandations : sécuriser et anticiper la décision

Avant d’opter pour l’IS, il est indispensable de procéder à une simulation fiscale et sociale complète. Cette analyse doit inclure le calcul de l’impôt sur les bénéfices, des cotisations sociales, et des coûts de gestion.

Un accompagnement par un avocat fiscaliste, tel que DENALI AVOCAT, est recommandé pour :

  • Évaluer la pertinence de l’option selon votre profil,
  • Sécuriser juridiquement et fiscalement l’option,
  • Mettre en place une stratégie de rémunération et de distribution optimisée,
  • Structurer votre patrimoine professionnel de manière durable.

L’entreprise individuelle à l’IS constitue un levier d’optimisation fiscale et patrimoniale puissant, à condition d’en maîtriser les implications. Elle offre une fiscalité plus favorable, une souplesse dans la gestion des revenus, et une meilleure organisation de l’activité. Toutefois, elle suppose un pilotage rigoureux, une anticipation stratégique, et un accompagnement sur-mesure.